dimanche 24 juillet 2016

Pérou : La Cordillera blanca - du 4 au 11 juin

Après s'être gorgés de soleil et de plage, il est temps pour nous de retourner dans les montagnes. Direction Huaraz ! Après un long trajet en bus de nuit, nous atteignons enfin la Chamonix péruvienne, la Katmandou des Andes, capitale de l'alpinisme andin (ou plutôt de l' "andinisme" comme on dit dans cette partie du monde...), encastrée à 3091m d'altitude entre les cordillères noire (à l'Ouest) et blanche (à l'Est).

En tout cas, pas question pour nous de jouer les René Desmaison en escaladant le Huandoy, ou l'Alpamayo, considérée comme la plus belle montagne du monde, ou encore l'Artesonraju, que la Paramount a rendu célèbre en l'utilisant comme logo, ou bien enfin, le Huascaran, point culminant du Pérou... Non, toutes ces montagnes, ces "palais de la nature", joyaux de la Cordillera blanca, nous allons les admirer de loin ou d'en bas, en cheminant dans les somptueuses vallées du Parc National Huascaran.


De la terrasse de l'hôtel, par temps clair, le matin, nous pouvons admirer les imposants sommets du Huascaran nord et sud, culminant respectivement à 6655m et 6768m...

"Jumpy", le lapin domestique de chez Caroline Lodge Inn !


Conçus pour faire face aux rigueurs hivernales des Andes, les tuk-tuks futuristes de Huaraz !

Presque un "Bat-tuk-tuk" avec sa ligne profilée et ses ailerons !
Comme la plupart des villes situées en plein coeur des Andes, Huaraz est soumise aux forces de la nature. Et la Pachamama n'a pas été tendre avec elle, comme en témoigne le tremblement de terre qui l'a pratiquement rayée de la carte en 1970... En résulte une ville plutôt moche, à l'image de la cathédrale toujours en construction sur la place principale...

La place centrale, comme toujours appelée "Plaza de armas"
La vallée de Huaraz est coutumière des catastrophes naturelles : cela fait en effet plus de 300 ans que les "aluviones" (mélange d'avalanches, chutes d'eau et glissements de terrain) ravagent la contrée. Mais la pire catastrophe est sans doute survenue le 31 mai 1970, quand un séisme d'environ 8 sur l'échelle de Richter causa la mort de presque la moitié des 30 000 habitants de Huaraz et surtout entraîna l'anéantissement de la ville de Yungay. Située en contrebas du Huascaran, Yungay a de fait été ensevelie par l'aluvion provoqué par le séisme : 50 millions de mètres cubes de granit et de glace ont englouti la quasi-totalité des 25 000 habitants de la ville...

La salle à manger de l'auberge, où tous les matins nous avons le droit à un desayuno copieux et à chaque fois différent.


Laguna Wilcacocha :

On nous avait conseillé, en arrivant à Huaraz, de prendre le temps de s'acclimater à l'altitude, et pour ce faire, de s'entraîner lors d'une petite randonnée dite d' "acclimatation". Pourquoi pas ! On n'a du coup rien trouvé de mieux que de la faire le jour même de notre arrivée... Suivant les conseils des jeunes de l'hôtel, on a jeté notre dévolu sur la sympathique balade en théorie de 2h maximum menant à la jolie laguna Wilcacocha, de laquelle on a une vue imprenable sur les pics enneigés de la Cordillère blanche...


On randonne donc sur les montagnes à l'Ouest de Huaraz, sur ce massif plus sombre et moins fréquenté que l'on appelle la "Cordillera negra".


Ça commence plutôt bien, dans un cadre idyllique, avec une mule et une rivière de montagne...


... Mais la laguna étant à 3745m d'altitude, on a quand même environ 700m de dénivelé à faire avant de l'atteindre ! Et très vite Marie accuse le coup : dénivelé, fatigue de la nuit en bus, altitude ... le tout combiné fait mauvais ménage...

La pente est bien raide sous le soleil...



On traverse plusieurs hameaux, le sentier passant au milieu des cultures.


On rencontre les animaux du coin ...


... ainsi que les habitants.

Remarquez le chapeau haut-de-forme, à la mode de Huaraz

Tout en grimpant, on profite de la vue sur le panorama des "nevados" (sommets enneigés) qui commencent à se faire grignoter par de menaçants nuages... 




Et voilà ! La fameuse laguna ... qui s'avère en fait n'être qu'une mare aux canards !

Un singulier canard "au bec bleu" :  sans doute un "érismature des Andes"




On savoure une pause pique-nique bien méritée en contemplant les sommets de la Cordillera blanca : entre autres, les Huascaran et le Huandoy (quelque part au fond, perdus dans les nuages), le Chopicalqui, le Churup ou le Palcaraju (que l'on reverra de plus près plus tard...).


Des "foulques macroules" barbottant dans la mare aux canards

Les mules : animaux de bât omniprésents dans les montagnes




Élections présidentielles de juin 2016 :

Nous sommes entrés au Pérou dans une folle effervescence politique. Et pour cause : nous étions en plein entre les deux tours des élections présidentielles qui devaient désigner un successeur à Ollanta Humala, qui vient d'effectuer ses deux mandats...



On a mis un peu de temps à comprendre ce qu'il se passait en voyant tous les graffitis et inscriptions sur les murs des maisons : on voyait des "K", des "PPK", des numéros, etc. Et puis finalement on a démêlé le noeud de l'affaire. Après le premier tour du 10 avril 2016, deux candidats sont sortis en tête : Keiko Fujimori du parti "Force populaire" et Pedro Pablo Kuczynski (dit PPK) du parti "Peruanos por el Kambio".




Ce dimanche 5 juin 2016, alors qu'on se reposait de notre précédente randonnée et qu'on anticipait les suivantes, se jouait donc la bataille des "K" : Keiko contre Kuczynski. Curieusement, c'est Keiko qui était donnée gagnante. "Curieusement" car la candidate à la double nationalité japono-péruvienne traînait un sacré boulet au pied : celui d'être la fille d'Albert Fujimori, l'ancien président controversé qui purge actuellement une peine de 25ans de prison pour crimes contre l'humanité commis sous ses dix ans de mandat.



Du coup, on a mas mal papotté avec les autres voyageurs, les gens de l'hôtel et les chauffeurs de taxi pour en apprendre d'avantage sur ce contexte politique pour le moins chaud bouillant, et voilà ce qu'il en est ressorti : Alberto Fujimori a pour lui d'avoir mis fin à l'insurrection du Sentier lumineux et d'avoir redressé la situation économique... Mais il est aussi accusé d'avoir couvert plusieurs bavures et massacres, dont celui de "Barrios altos" en 1991, sans compter la sordide affaire de la stérilisation forcée de femmes indigènes des quartiers pauvres de Lima, et comme si cela ne suffisait pas, pour en achever le portrait, on l'accuse aussi de corruption et d'avoir transporté de la cocaïne (pourquoi se gêner ?) dans l'avion présidentiel... Bref, avec tout ça, on a du mal à comprendre comment Keiko arrive encore à se présenter (même si évidemment le père ne fait pas la fille), mais surtout comment les électeurs ne soient pas un tantinet méfiants à l'égard de la famille Fujimori ...



... Quoiqu'il en soit, trois jours après le vote, on a enfin pu savoir les résultats... Ça se jouait à 50/50, et seulement un infime nombre d'électeurs a fait pencher la balance du côté Kuczynski. Dans la bataille des "K", c'est donc l'économiste à la double nationalité americano-péruvienne qui l'a remporté !

Pour conclure, ce qu'il faut retenir de ces élections, du moins en tant que touristes, c'est que le dimanche 5 juin, aucune "tienda" ni aucun bar ... ne pouvaient servir de bières !

La Coca : 

Échaudés par la première rando à Huaraz, on a décidé de prendre le taureau par les cornes et de contrer le mal de l'altitude avec les moyens du bord, à savoir les feuilles de coca, en infusion ou en chique ! On n'a pu s'en servir qu'au Pérou et en Bolivie, la coca étant interdite en Équateur (ils la remplacent par du sucre de canne)...



Il faut savoir que la coca est consommée par plus de 80% des andins (en maté ou à mastiquer) car elle aide à la vie en altitude (stimulation respiratoire, résistance à l'effort et augmentation des globules).

Pour ceux qui voudraient se lancer dans la production à grande échelle en Bretagne ou en Normandie, ne vous réjouissez pas trop vite, car il ne faut pas moins de 328kg de feuilles de coca pour obtenir 1kg de pâte, base de la cocaïne, qui, elle-même, donne 250g de poudre... Vu comme ça, vaut mieux gagner sa croûte avec des patates ! D'autant plus que l'exportation est bien entendu interdite !

Laguna 69 :

Suite à notre baptême du feu à la laguna Wilcacocha, nous nous sentions prêts à attaquer la fameuse Laguna 69 (appelée ainsi parce que celle qui la précède se nomme la ... 68, tout simplement !), joyau du parc Huascaran, vantée par tous les trekkeurs rencontrés auparavant. Bref, on ne voulait pas la rater !

Après 3h de route en bus collectif, le chauffeur nous dépose au début de la rando.



Dès le début, les paysages sont grandioses !





Passage du gué avec succès 

Plusieurs cascades agrémentent le chemin



Après 3h de marche et une bonne montée, on arrive à la Laguna .... 68 ! Fausse joie, il faut encore persévérer ! 



Après 4 bonnes heures de marche, fatiguantes mais tellement exaltantes, nous arrivons enfin à la laguna, à l'eau digne de Koh Ngai, non pour la température, glaciale évidemment, mais pour la pureté de son bleu turquoise...

L'eau était tellement limpide qu'Antoine s'est laissé tenter... Mais à 4650m
d'altitude, le bain glacé fut de courte durée !


Le créateur de ce beau lac glaciaire n'est rien d'autre que le glacier qui la surplombe :
le Chacraraju, qui culmine à 6112m .





Au lieu de faire cette randonnée en une journée, au risque d'être épuisés et de ne pas en profiter, nous avons décidé de la répartir sur deux jours, en plantant notre tente de location où bon nous semblait, si possible à l'abri du vent.

Tout autour de notre tente, des voisins de camping ! Ici, une maman et son petit. Des lapins ? ...

... Eh non ! Regardez bien la queue ! Ce sont des viscaches, de la famille des chinchillas !

Un emplacement royal ! Au coeur de la cordillère !



À vrai dire, on appréhende un peu le froid, à plus de 4000m d'altitude... D'autant plus que tous les randonneurs rencontrés précédemment nous ont pour le moins "refroidis" sur les nuits en tente à cette saison.

Par précaution, on a même sorti les couvertures de survie ! ...
Mais en fin de compte, on s'est payé le luxe d'avoir trop chaud !

Bilan du camping : on a évité le vent et le froid, mais on n'a pas pu contrer la pluie continue qui a traversé notre peu imperméable tente de location...

Au réveil, nous découvrons étonnés que nos voisins les viscaches se sont tranquillement métamorphosés en vaches pendant la nuit. (En même temps, de "viscaches" à "vaches", il n'y a que trois lettres... )


Deux beaux spécimens de "bernaches des Andes", rencontrés à 4000m d'altitude !

Les sommets Nord et Sud de l'imposant Huascaran


Le "quenua", un des arbres les plus résistants au froid de la planète !


Le chemin du retour passe devant les lagunas Llanganuco : Chinancocha et Orconcocha, à 3850m (on a donc fait environ 900m de dénivelé en descente).



Les lagunas "Llanganuco", encadrées par d'importantes falaises, le long de la piste menant au point de départ du fameux trek de Santa Cruz


Des "quenuas" devant les lagunas Llanganuco


Ishinca :

Dernière rando à Huaraz : un trek dans la vallée d'Ishinca, conseillé encore une fois par l'un des jeunes volontaires de chez Caroline. En deux jours, comme pour la laguna, mais une nuit en refuge cette fois-ci, non plus en tente !


Panorama de la Cordillera negra

Au premier plan : une randonneuse aguerrie. Au second : le Huascaran et ses 6768m !

Point de départ de la rando : la Laguna Uruscocha, du nom du Nevado Urus qui la surplombe.









Peu de rencontres sur le chemin, hormis ces quelques chevaux sauvages...

La route est encore longue jusqu'au refuge, mais le moral tient bon : des bières nous attendent !

Une carcasse de mauvais augure : finira-t-on ainsi, la peau sur les os, dépouillés par les vautours, sans avoir pu atteindre le refuge salvateur ?


"Le petit pont de bois qui ne tenait plus guère ... que par un grand mystère !"

"Feliz cumpleanos Maria !" Eh oui, c'est à 4350m d'altitude que l'on fête les
31 printemps de Marie ! Et les cervezas sont même accompagnées
de pop-corns pour l'occasion !

Derrière Marie, le refuge Ishinca, et derrière le refuge,
les "nevados" Palcaraju (5550m) et Tocllaraju (6032m). 

Le refuge d'Ishinca fait partie de ces trois gîtes de haute montagne gérés par l'association italienne "Don Bosco", fondée par le prêtre salésien Ugo de Censi. L'association travaille avec les habitants du coin, notamment avec les muletiers, et les bénéfices sont reversés à des projets locaux. 

Un copieux petit déjeuner nous est servi avant de reprendre la chemin du retour


Au matin, le temps est un peu plus dégagé... Ouf, on voit des morceaux de ciel bleu !



Marie posant fièrement en conquérante des cordillères !




Sur le chemin du retour, Ronaldo, notre chauffeur de taxi, nous emmène faire un petit tour du côté des ruines d'Honcopampa, antérieures aux Incas, comme Chan Chan... Les constructions, en forme de pyramides, étaient sans doute des temples appartenant à la culture Chavin (comme le site archéologique Chavin de Huantar, plus au Sud mais que nous n'a on pas eu le temps de visiter).





Enfin, on conclut notre trek d'Ishinca par une petite douceur revigorante : les bains thermaux de Chancos, conseillés par Ronaldo car censés être meilleurs que ceux de Monterrey ...


On se prête au jeu et on prend deux boletos pour les "cuevas". On n'a pas notre dictionnaire sur nous et on traduit "cuves" (sous-entendu d'eau chaude), alors que "cuevas", évidemment, c'étaient "grottes" !

Du coup, on se retrouve dans une "grotte-sauna" à 45° qui évacue les
dernières toxines que l'on n'avait pas déjà éliminées en marchant !

Heureuse surprise ensuite (quand on a enfin réussit à expliquer ce que l'on voulait) : on découvre des baignoires individuelles que l'on remplit soi-même d'eau chaude thermale !



Et c'est sur cette "Baila del Bano" ("danse du bain" célèbre à Chancos) que l'on boucle notre périple dans la Cordillère blanche ! Prochaine étape : Lima. Puis on poursuivra vers le Sud, encore et encore.










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